La racialisation de la santé publique aux États-Unis : entre pouvoir sur la vie et droit de laisser mourir

摘要

Aux États-Unis, une intensification de l'usage de la race en santé publique a récemment été notée; une idée qui est pourtant controversée dans les sciences. La race a été vue dans ce contexte comme un objet de discours entre pouvoirs et savoirs, un objet qui se réfère au corps devenu au cours des derniers siècles un site discursif pour représenter la différence. Cet article s'appuie sur une analyse de documents de la santé publique parus aux États-Unis et issus de bureaux fédéraux et d'une importante revue spécialisée dans le domaine sanitaire, qui ont été publiés entre 2001 et 2009. Cette étude a analysé la manière dont la race est représentée, produite comme objet de connaissance et régulée par les pratiques discursives dans ces documents. Les résultats décrivent deux processus enchevêtrés, la racialisation et la sanitarisation, qui concourent à reformuler l'idée de race. Le premier est un ensemble d'opérations qui visent à identifier, à situer et à opposer les sujets et les groupes à partir de labels standardisés. La sanitarisation assure la traduction des groupes racialisés en termes de maladies, de comportements, de vie ou de mort. Ces pratiques aboutissent à la caractérisation et à la formation d'objets racialisés et sanitarisés et à des stéréotypes ; un ensemble d'opérations qui a tendance à naturaliser la différence. La racialisation apparaît également tiraillée entre un pouvoir sur la vie et un droit de laisser mourir. Enfin, cette étude propose aux acteurs de la santé publique de sortir des frontières imposées par le discours racialisant.%In the United States of America (USA), an escalation of the use of race in public health has recently been observed; a controversial idea for the world of science. In this context, race has been seen as the subject of a discourse between power and knowledge, subject referring to the human body which became the focus of discussions to represent diversity over the past few centuries. This article is based on the analysis of public health documents published in the USA by federal agencies and an important journal specialized in health between 2001 and 2009. The study has analyzed the way in which race is depicted as object of knowledge and regulated by discursive practices in the documents. The results describe two entangled processes - the racialization and the process of building health - that contribute to reshaping the idea of race. The former is a set of operations that aim to identify, place and oppose groups and subjects based on standardized labels. The latter ensures the translation of racialized groups in terms of disease, behaviours, life or death. These practices result in the characterization and the formation of racialized and health objects as well as stereotypes, a set of actions that tend towards the naturalization of difference. Racialization also appears to be split between a power over life and a right to let die. Finally, the present study recommends public health stakeholders to go beyond boundaries imposed by the racialization discourse.