"Les chaudronniers ou maigniens ne figurent pas dans le Livre des Metiers. Pourtant ils formaient, dit Cheruel, une corporation fort ancienne, dont les statuts furent confirmes par Louis XII en 1514. On distinguait les chaudronniers-grossiers, qui ebauchaient l'ouvrage; les chaudronniers-planeurs, qui l'achevaient; les chaudronniers faiseurs d'instruments de musique, et enfin, les chaudronniers au sifflet, qui parcouraient les campagnes. Ces derniers sont a peu pres les seuls qui presentent de l'interet au point de vue qui nous occupe. On appelait ainsi, aux siecles derniers, les chaudronniers des provinces, particulierement d'Auvergne, qui, courant la campagne, se servaient d'un sifflet antique pour avertir les habitants des lieux ou ils passaient, de leur apporter a raccommoder les ustensiles de cuisine; ils achetaient aussi et revendaient de vieux cuivres. Le Bocage normand partageait, dit Lecoeur, avec l'Auvergne, le privilege de fournir la France de chaudronniers ambulants, fondeurs, etameurs, raccommodeurs de vaisselle et fabricants de soufflets. C'est au commencement du printemps que ces braves gens desertent leurs paroisses natales. Ils emmenent avec eux, pour chiner et les aider dans leur travail, leurs jeunes garcons des qu'ils ont atteint l'age de douze ans. Chacun de ces Raquinaudeux ou Rouleurs, ainsi qu'on les appelle, gagne alors son canton ordinaire, va revoir sa petite clientele. Ils se disseminent sur tous les points de la France, meme jusque sur les frontieres de Suisse, d'Italie et d'Espagne. On les rencontre sur toutes les routes, cheminant a petites journees, l'echine peniblement courbee sous le poids de leur bataclan: bassine de fer a trois pieds, soufflet, moules a cuillers, marteaux et autres ustensiles de leur metier. Derriere le pere trottine l'enfant, s'attardant parfois au rebord des haies ou les oiseaux recommencent a edifier leurs nids. L'hiver les ramene au logis; ils le regagnent vers la Toussaint, rapportant le produit de leur travail et de leurs economies. Le petit magot peniblement amasse est le pain de la famille pendant la dure saison. Souvent a force de perseverance et de courage, les peres amassent, pour leurs enfants, un petit patrimoine. Durant l'absence du chef de la famille, c'est la femme qui a le gouvernement de la maison et qui s'occupe des recoltes. Le mari a son retour trouve tout en ordre et s'occupe des labours et de la pilaison des pommes ou des poires.
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