Une association a décidé de céder une partie des terrains dont elle est propriétaire. D'une superficie d'une dizaine d'hectares (ha), situés au bord du lac Léman, ceux-ci avaient été classés en 1979 par le préfet de la Savoie en espaces naturels sur le fondement de la loi du 31 décembre 1976 portant réforme de l'urbanisme. Faisant suite à la déclaration d'intention d'aliéner (DIA), le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres qui s'était substitué au département3 avait décidé, sur le fondement de l'article L. 215-14 du code de l'urbanisme4, de les préempter. Alors que les recours sont souvent exercés par les acquéreurs évincés, c'est ici le vendeur, l'association donc, qui a contesté cette décision devant le tribunal administratif de Grenoble. Ce dernier a fait droit à sa demande d'annulation par un jugement du 25 janvier 2021 dont le Conservatoire a relevé appel devant la cour administrative d'appel de Lyon. _Pourquoi cette annulation ? En raison d'une erreur de codification... L'ordonnance du 23 septembre 2015 relative à la partie législative du livre l~(er) du code de l'urbanisme, ratifiée par l'article 156 de la loi du 8 ao?t 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, a procédé à une nouvelle codification des dispositions relatives aux espaces naturels sensibles (ENS), et notamment celles relatives au droit de préemption dans ces espaces, aux articles L. 215-1 et suivants. Ce texte a également abrogé, à compter du 1~(er) janvier 2016, la partie législative du livre I~(er) du code de l'urbanisme dans sa rédaction antérieure, mais sans reprendre les dispositions de l'article L. 142-12 dudit code ! Aussi, depuis cette date, le droit de préemption prévu aux articles L. 215-1 et suivants du code de l'urbanisme n'était-il plus applicable dans les zones de préemption qui avaient été créées par les préfets au titre de la législation sur les périmètres sensibles avant l'entrée en vigueur de la loi du 18 juillet 1985 relative à la définition et à la mise en ?uvre de principes d'aménagement, sauf à ce que les départements les aient incluses dans les zones de préemption qu'ils avaient eux-mêmes créées au titre des ENS. Il s'agit d'une malfa?on législative, d'une erreur légistique. L'exercice du droit de préemption par le Conservatoire de l'espace littoral dans les espaces délimités avant l'intervention de la loi du 18 juillet 1985 était donc dépourvu de toute base légale et l'annulation était tout aussi inévitable que fondée. Cette maladresse emportait de nombreuses conséquences juridiques, pratiques et financières importantes : le Conservatoire a conclu dans ces zones créées avant 1986 une centaine de transactions. Depuis 2016, les actes d'acquisitions sont estimés à 4,5 millions d'euros pour une surface de 290 ha.
展开▼